Les concours publicitaires organisés par les denturologistes : oui, mais à quel prix?


NDLR Le présent texte ne représente qu’un survol de la question juridique et ne constitue aucunement une opinion juridique en soi. Chaque dossier se doit d’être analysé à la lumière des faits qui lui sont propres. N’hésitez pas à communiquer avec les auteurs pour plus de détails.


 

Ça y est, vous avez trouvé la façon d’attirer de nouveaux clients dans votre clinique : pour chaque nouveau client référé, un billet de participation sera déposé dans une boîte pour le tirage d’un iPad. Ou encore, une mention « J’aime » sur Facebook = une chance de gagner une prothèse dentaire! On voit défiler ce genre de concours tous les jours sur les réseaux sociaux. Pourquoi pas vous?

 

De prime abord, rien dans la Loi sur la denturologie ni dans le Code de déontologie de l’Ordre des denturologistes du Québec ne prohibe l’utilisation des concours à des fins publicitaires par les denturologistes. Ces concours peuvent d’ailleurs être une bonne façon de développer votre visibilité et votre clientèle. Néanmoins, il existe certaines balises qu’il faut respecter. Faisons le point.

 

Les obligations déontologiques

Diverses règles sont prévues par votre code de déontologie relativement aux déclarations ou messages publicitaires. Ces règles sont évidemment applicables en matière de concours publicitaires, avec les adaptations nécessaires. Notamment, le concours doit indiquer quels sont les services de denturologie couverts (par exemple, dans le cas d’un chèque-cadeau), le nom du denturologiste et son titre. De plus, il ne doit pas contenir de témoignages d’appui ou de reconnaissance, ni de publicité fausse, trompeuse, faisant appel à l’émotivité du public ou susceptible d’induire en erreur (1).

 

Les denturologistes ont aussi l’obligation d’agir avec objectivité, modération et dignité et d’éviter « toutes les méthodes et attitudes susceptibles de donner à sa profession un caractère de lucre et de mercantilisme (2) » . Autrement dit, bien que les concours soient permis, il va de soi que les processus publicitaires utilisés doivent permettre de préserver l’honneur et la dignité de la profession.

 

Attention! Un arpenteur-géomètre a déjà été déclaré coupable d’une faute déontologique alors qu’il avait organisé un tirage dont le prix était une toile. Dans cette affaire, les courtiers immobiliers qui lui référaient des clients obtenaient un coupon de participation (3). Or, tout comme les arpenteursgéomètres, le denturologiste ne peut « verser, offrir de verser ni s’engager à verser aucune ristourne, commission ou autre avantage relativement à l’exercice de sa profession », selon l’article 38 de votre code de déontologie. Ceci nous amène à penser que les denturologistes devraient être prudents avant d’organiser des concours basés sur le référencement de clients…

 

Dans tous les cas, nous vous invitons à relire attentivement votre code de déontologie avant de faire circuler un concours. En cas de doute, n’hésitez pas à contacter votre Association ou votre avocat.

 

Les obligations légales

 

En plus de respecter les obligations prévues au code de déontologie, vous devez également, en matière de concours publicitaires, vous conformer aux obligations prévues par les lois provinciales et fédérales.

 

Comme tout citoyen, les denturologistes sont soumis à la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les concours d’amusement (4). Celle-ci vise tout « concours […] dont le résultat est l’attribution d’un prix et dont le but est de promouvoir les intérêts commerciaux d’une personne au bénéfice de laquelle il est tenu ». Le denturologiste devra notamment transmettre divers documents et droits à la Régie des alcools, des courses et des jeux. Les Règles sur les concours publicitaires (5) prévoient pour leur part ce qui doit être compris dans le texte des règlements. De nombreuses conditions étant prévues, nous vous invitons à faire auparavant toutes les vérifications afin d’éviter de mauvaises surprises!

 

Au passage, mentionnons que le Code criminel interdit les concours qui sont conditionnels à un achat ou à la dépense d’une somme quelconque par vos patients6.

 

En résumé, il est tout à fait possible pour un denturologiste d’organiser un concours dans le but de remercier sa clientèle ou d’augmenter l’affluence de sa clinique. Toutefois, vous devez alors vous assurer qu’un tel processus est réalisé dans le respect de la loi et de vos obligations déontologiques. Dans tous les cas, nous vous incitons à bien vous informer et à consulter votre avocat.

 

Article publié dans Le Denturo, hiver 2016-2017.


1 Code de déontologie de l’Ordre des denturologistes du Québec, R.L.R.Q., c. D-4, r. 6, art. 5 à 5.11.1.
2 Code de déontologie de l’Ordre des denturologistes du Québec, R.L.R.Q., c. D-4, r. 6, art. 22.1 et 22.2.
3 Ordre des arpenteurs-géomètres du Québec c. Ladouceur, 2004 CanLII 72225 (QC OAGQ).
4 Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d’amusement, R.L.R.Q. c. L-6.
5 Règles sur les concours publicitaires, R.L.R.Q., c. L-6, r. 6.
6 Code criminel, L.R.C. (1985) ch. C-46, art. 206(1)f).

 

AUTEURS

 

Me Alice Bourgault-Roy est titulaire d’un baccalauréat en droit de l’Université de Montréal, dont une partie a été complétée à la University College Cork, en Irlande. Admise au Barreau du Québec en 2015, elle est avocate au sein de l’équipe du Cabinet De Chantal, D’Amour, Fortier, où elle accomplit des mandats touchant un large éventail de domaines du droit.

Admis au Barreau en 1996, Me Martin Courville exerce principalement en litige civil et commercial. Sa pratique touche donc des dossiers aussi variés que l’immobilier, les marques de commerce, les conventions d’actionnaires et la responsabilité civile et professionnelle. Me Courville a également développé au fil des ans une solide expertise en matière de déontologie et en droit disciplinaire, et représente à ce titre plusieurs professionnels devant de nombreux comités de discipline, dont des dentistes et des denturologistes.

 

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